Finies les nominations dans de petites structures pour servir d’alibi et afficher une bonne volonté de parité. Avec une directrice à la CNSA, une grande partie des CAF de première et deuxième catégorie dirigées par des femmes, et dans l’ensemble de la Sécu un rétablissement de l’équilibre pour les postes d’agents de direction, les dirigeantes s’imposent dans la protection sociale. Les Ocam ne sont pas en reste, avec des femmes à la tête de la FFA et du Ctip. Et deux des plus grosses mutuelles, sont pilotées par des directrices générales. Tout cela va dans le bon sens, mais il ne faut pas s’y limiter.
Dans la conception même des prestations, la femme sort peu à peu de son traditionnel rôle d’épouse ou de mère de famille sans réelle individualité. Dès 1972, Pierre Laroque rappelait qu’à l’heure d’une affirmation toujours plus pressante de l’égalité des sexes, « les régimes en vigueur ont été conçus et se sont développés en fonction de l’hypothèse de base plus ou moins implicite d’une minorité féminine, d’une dépendance de la femme dans la famille ». En remettant en cause certains principes et aujourd’hui, avec des aides et dispositifs non plus rattachés à la famille ou au couple, mais à l’individu, la conception même de ces prestations serait-elle en train de se mettre à la parité ?
Du côté des élus, les femmes ont depuis longtemps franchi les portes des conseils et conseils d’administration des caisses nationales. Elles occupent même la présidence de deux d’entre eux . Chez les mutualistes, ces instances demeurent très masculines malgré quelques bons élèves. Une ordonnance applicable depuis le début de l’année changera la donne en imposant un minimum de 40% d’administrateurs de chaque sexe. Dommage de devoir passer par la loi pour accélérer les choses, qui plus est dans un secteur comme celui de l’ESS !
Mais dans l’ensemble de la protection sociale, l’égalité est encore loin d’être la règle. Ainsi, les métiers du care, historiquement confiés à des religieuses, restent féminins, avec des conditions de travail et salariales souvent dégradées. Mais le monde change avec son lot de défis et de reconfigurations, en particulier des modes de travail. En rebattant les cartes, ils permettront peut-être plus d’égalité entre les sexes en passant par la base, et non par le haut, de la pyramide hiérarchique.
Emilie Guédé et Florence Pinaud