C’est décidé ! L’Etat prend définitivement la main pour reformater la santé et la protection sociale du pays. Ce champ de la politique gouvernementale est peut-être le plus cohérent dans l’action menée depuis mai 2017. Et pour ceux qui connurent les affres des débats idéologiques passés sur l’avenir de la Sécurité sociale, les choses semblent irréversibles.
Dernière illustration en date de ce tsunami politique et social eu égard à nos traditions sociales, celui du financement de la Sécurité sociale, du moins celui des rapports entre l’Etat central et les quelque 780 milliards d’euros de dépenses de protection sociale du pays. Lesquelles passeront l’année prochaine sous les fourches caudines de l’Etat pour son pilotage.
A moyen terme, la LFSS deviendra une loi de financement de la protection sociale incluant en sus des actuels régimes sociaux de base l’assurance chômage, les retraites complémentaires, la dépendance. Le retour à l’équilibre des comptes en 2019 ne peut masquer une opération d’envergure, qui s’accompagnera au passage d’une récupération des excédents de la Sécu par le budget de l’Etat.
Cette révolution prolonge les autres chantiers de réforme engagés, comme la lutte contre la pauvreté, la santé et le redéploiement de l’offre de soins, les retraites, la politique de l’emploi et l’indemnisation du chômage, la formation professionnelle pour ne citer que les plus visibles. Bref, tout y passe.
Des perdants dans l’affaire, il y en a.
A commencer par les milieux intermédiaires avec leurs corporatismes bien de chez nous, ancrés qu’ils sont dans des représentations et des modèles de pratiques professionnelles forcément datés. La gestion paritaire est désormais placée en coupe réglée. Les élus de la Sécu ne disposent guère de prérogatives depuis 2004.
Les mutuelles se voient bornées dans leur dynamique. En fait, l’Etat central les juge peu utiles pour le moment dans la reconfiguration du système. Il est vrai que l’opinion, relayée par les médias, alimente d’abord une demande d’Etat sur la question sociale.
Des gagnants dans l’affaire, il y en aura normalement. Les usagers en général, les bénéficiaires de prestations en particulier, car le système, en devenant plus universaliste, veut gagner en équité et en efficacité. Surtout, il doit prendre à bras-le-corps les potentiels du numérique et de la révolution de la prise en charge des risques sociaux qui nous attend.
Des craintes, il y en a aussi. Un déficit démocratique et un Etat peu capacitaire historiquement.