« Haro sur les mutuelles ! » tel pourrait être le cri de ralliement d’une majorité de nos élus politiques depuis plusieurs années. Clairement un paradoxe historique et politique.
En 2013, l’État décide la généralisation de la complémentaire santé, quitte au passage à affaiblir plus ou moins ouvertement les acteurs mutualistes. Dix ans plus tard, après avoir quasiment garrotté les libertés du secteur, il « retournerait sa veste » et décréterait ne plus avoir besoin d’elles au motif d’un projet de « Grande Sécu ». Dans nos colonnes, nous décrivons un possible scénario intermédiaire pour l’actuel président de la République. Pour se sortir intelligemment d’un fantasme technocratique d’un État encore plus solitaire et tutélaire désireux de capter toute la vie sociale du pays.
L’histoire de la Sécurité sociale puise sa source avec celle de la Mutualité. Elle en conserve toujours les fondamentaux. Pour sa dimension populaire et sociétale, nos chefs d’État ont régulièrement honoré le mouvement mutualiste depuis 1982. Il n’est pas si loin le temps où les présidents de la République venaient en grande pompe saluer les congrès de la Mutualité Française et appeler à la mobilisation. Escomptant ainsi l’appui des milliers d’élus de terrain et de la France « profonde » pour bousculer les corporatismes et faire de la pédagogie des réformes décidées par l’exécutif.
Il y a un sentiment d’ingratitude, et plus largement de méconnaissance du pays, que de croire qu’un Jupiter de la santé et du social serait plus légitime et plus efficient pour agir. Évidemment, le marché des Ocam doit être réformé au nom de l’intérêt général. Et même de façon vigoureuse lorsque l’on voit des pratiques de certains opérateurs, peu soucieuses de solidarisme, qui ont fini par engendrer une hypersegmentation du marché.
Dans cette affaire de « Grande Sécu », persiste un regrettable manque d’imagination politique et d’esprit d’entreprise sociale de part et d’autre.
On ne change pas la société par décret. Un État social surpuissant conduit à un aveuglement bureaucratique et démobilisateur des acteurs. L’exemple de la crise hospitalière que connaît le pays le démontre chaque jour.
Aucune démocratie ne peut vivre sereinement sans une démocratie sociale vivifiée parce que responsabilisée. Laisser respirer les acteurs, voilà le vrai défi !