dans LIBRES PROPOS & ÉDITOS

La mission d’évaluation de la gestion de la crise de la Covid-19 pilotée par le professeur Didier Pittet a présenté son rapport visant à améliorer « la réactivité et la résilience du modèle sanitaire et socio-économique français face aux crises sanitaires ». Nous avions déjà, en primeur évoqué les préconisations du scientifique suisse.

Au-delà des 40 propositions formulées, le professeur Pittet insiste tout particulièrement sur le fait que les questions de santé publique occupent une « place trop marginale » dans le système sanitaire français. Une situation qui ne peut perdurer et qui appelle à une rupture profonde avec les pratiques actuelles. Un changement qui passera forcément par une réévaluation des priorités chez les pouvoirs publics et les professionnels de santé.

En médecine de ville, un constat s’impose. Le changement de braquet passera inévitablement par un projet allant au-delà des mesures technico-financières incitant les acteurs de terrain à agir et dont les résultats sont au fil des ans au mieux mitigés. Le fait que leurs collègues français bénéficient d’une rémunération complémentaire type ROSP pour prescrire des dépistages de cancer du sein ou pour vacciner des personnes à risque, fait lever plus d’un sourcil chez une majorité de médecins généralistes européens. Une réaction somme toute logique pour des praticiens formés à ce que les actions de prévention et de santé publique qu’ils mettent en place soient le socle de leur système sanitaire. À défaut d’être supprimé, le logiciel ROSP doit donc être repensé. Cela doit désormais être une exigence. En parallèle, il devient également urgent de se pencher sérieusement sur les questions d’éducation à la santé. Un concept quasi inexistant dans nos contrées, mais qui, bien pensé et utilisé, peut permettre de donner davantage de respiration à un système sanitaire paraissant aussi asphyxié que le nôtre. Ces exemples, parmi d’autres, ne sont qu’un échantillon de ce qu’englobe le fameux concept du care (prendre soin) que nos gouvernants érigent inlassablement comme un supra-objectif dans leurs discours de politique générale de santé depuis une décennie. Une ambition qui au final, n’aura jamais véritablement dépassé le stade de l’intention, car trop disruptive pour un écosystème qui bien, qu’il le dénonce souvent, se complait et parfois même se nourrit de cette politique privilégiant le court terme.

Alors oui, le Président de la République en annonçant cette semaine la création d’une académie mondiale de santé de l’OMS à Lyon pour 2023 entend redynamiser ce chantier. L’initiative est à saluer. Toutefois, n’oublions pas qu’en matière de santé publique, toute action s’inscrit dans le temps long or, le temps presse…

 

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