On le craignait. C’est arrivé. L’effondrement du taux de vote des médecins libéraux aux élections des URPS confirme le bouleversement inexpugnable du paysage institutionnel de la médecine libérale française.
Il n’y aura pas de retour en arrière, à un passé autrefois glorieux pour une corporation désormais écartelée entre des attentes, des pratiques et des intérêts divergents. La médecine française, publique et libérale, est d’abord malade de ses divisions. Huit syndicats se partageant à peine vingt mille voix, prétendant fixer, en accord avec l’État et l’Assurance Maladie, les règles de l’organisation et de l’accès aux soins en ville de 67 millions de Français. N’y a-t-il pas là un problème dans l’équation ?
La médecine libérale est aussi malade de ses combats d’arrière-garde. Le retard pris en matière de déploiement du numérique, les refus de certains de tendre vers des organisations collectives et coordonnées des acteurs, l’absence de renouvellement dans les instances syndicales (où sont les jeunes et les femmes ?)… Cette liste sans fin résonne comme autant de pertes de chance pour le système, les patients et les professionnels eux-mêmes.
Dès lors, notre pays est confronté à un double défi. On ne fabrique pas un système de santé sans médecins et sans une chaîne professionnelle, nationale et locale solidaire et réactive. Mais on ne peut non plus faire reposer sur les seuls médecins tous les contours de ce que doit l’écosystème sanitaire de demain. Les mutations passent par un fort virage ambulatoire. Il en va de la pérennisation du système. Bien que dramatique, la crise du Covid-19, et son impact sur le monde hospitalier, ne saurait faire oublier cette exigence. D’où le dilemme avec une CNAM qui va devoir d’ici deux ans rouvrir son chantier conventionnel pour définir et porter les profondes mutations attendues de tous. Elle organisera ce rendez-vous avec des partenaires affaiblis. Lesquels par effet miroir réduiront le potentiel stratégique de mise en action de l’Assurance Maladie.
Peu à peu, le centre de gravité de la santé et des soins des Français se déplace. Vers l’État central et régional avec les ARS, vers le terrain avec les CPTS et les expérimentations de type Article 51, vers les innovateurs et vers les patients. La recomposition des acteurs et des règles du jeu est en cours. La fin d’une époque ?