Saisie par la présidente de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale d’une demande d’enquête sur la pédopsychiatrie, la Cour des comptes a rendu public son rapport fin mars.
Regrettant le manque de données, les sages de la rue Cambon estiment qu’environ 1,6 million d’enfants et d’adolescents souffrent de troubles psychiques. Ces derniers ont largement augmenté sous l’effet de la pandémie de Covid-19, comme dans tous les pays de l’OCDE. Pour la Cour, l’offre de soins psychique est «inadaptée aux besoins de la jeunesse». Ainsi, «dans l’état actuel de l’organisation des soins, et en particulier dans les centres médico-psychologiques infanto-juvéniles (CMP-IJ), une partie des patients suivis ne souffrent que de troubles légers, au détriment de la prise en charge d’enfants souffrant de troubles plus sévères». Alors que 750 000 et 850 000 jeunes bénéficient chaque année de soins dans ce champ, de fortes inégalités territoriales existent. En outre, le nombre de pédopsychiatres a reculé de 34% en une dizaine d’années.
Les magistrats constatent également que le parcours de soins est «trop peu gradué» et l’ «offre saturée». Si un effort en matière de prévention a été impulsé dans le cadre des «1000 premiers jours», la dynamique n’est pas poursuivie à l’école. En ville, les généralistes et spécialistes «méconnaissent encore trop les caractéristiques des troubles psychiques des enfants et des adolescents». De leur côté, les centres médico-psychologiques infanto-juvéniles (CMP-IJ) «ont été progressivement submergés par les demandes d’information, de conseil, d’évaluation et de suivi, allant des troubles légers à sévères». Pour les magistrats, «leur accès universel, c’est-à-dire sans condition et sans avance de frais pour les familles, a l’effet paradoxal qu’ils ne parviennent pas à assurer en totalité leur mission de suivi des troubles psychiques les plus sévères». Est notamment recommandée une expérimentation de maisons de l’enfance et de l’adolescence pour «assurer un accueil de première ligne plus efficace» et permettre aux CMP-IJ de se consacrer en particulier au suivi des troubles modérés à sévères et à la coordination des parcours.
Par ailleurs, si la volonté du ministère de la Santé de renforcer l’accès aux soins infanto-juvénile est soulignée, la gouvernance apparaît «peu opérationnelle». La nécessité de renforcer l’attractivité des métiers de soins infanto-juvéniles est également relevée.
Réagissant à ce rapport, la Société Française de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent et Disciplines Associées (SFPEADA), appelle en prolongement des Assises de la santé de l’enfant – qui se dérouleront au printemps – à lancer des Assises de la Refondation de la Santé Mentale et de la Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent. De son côté, le Syndicat national des psychiatres privés (SNPP), pointe une «rémunération désincitative» pour la médecine de ville et appelle à intégrer plusieurs mesures d’urgence dans le futur règlement arbitral, notamment d’augmenter le tarif de la consultation pour les psychiatres, neuropsychiatres, neurologues (CNPSY) à 60 €.