Les négociations conventionnelles entre l’Assurance Maladie et les médecins libéraux se sont conclues vendredi après-midi par la signature de l’avenant 9.
MG France, Avenir-Spé Le Bloc et la CSMF ont ratifié cet accord, «ce qui traduit une adhésion large à cet avenant», se félicite Thomas Fatôme, directeur général de la Cnam. Ces trois signataires représentant 54% des généralistes et 61% des spécialistes. L’UFML-S et le SML ont fait part de leur refus de parapher ce texte. La FMF, dont les instances doivent encore se réunir, devrait suivre la même voie.
Thomas Fatôme pointe un «aboutissement important», intégrant des engagements d’envergure pour la médecine ville, un an après le Ségur de la santé. Doté d’une enveloppe de 786 Ms €, cet avenant s’articule autour de 4 grands objectifs : renforcer l’accès aux soins pour les publics prioritaires ; faire face aux besoins de soins non programmés ; consolider le parcours de soins, en soutenant les spécialités cliniques et en fixant un nouveau cadre à la téléconsultation et la téléexpertise ; accompagner le virage numérique de la médecine de ville.
Généralistes et spécialistes bénéficient du même effort financier, soit chacun 165 Ms €. Les soins non programmés représentent 150 Ms €, la téléconsultation et la téléexpertise 6 Ms €, et le numérique en santé 3 00 Ms €.
La visite à domicile d’un patient de 80 ans et plus en ALD est revalorisée à hauteur de 70 €, dans la limite de quatre par an. Concernant les plus jeunes, un «bilan de santé et prévention» sera réalisé dès l’entrée dans le dispositif de protection de l’enfance («consultation complexe» par un généraliste ou un pédiatre). La prise en charge des troubles du neurodéveloppement et du très jeune enfant (0-2 ans) est renforcée, une majoration est créée en pédopsychiatrie.
Plusieurs mesures visent à améliorer la prise en charge des personnes handicapées, notamment la création d’une consultation très complexe (60 €) pour le changement de médecin traitant et le remplissage des dossiers MDPH.
Pour les soins non programmés, l’objectif est de fixer «un premier cadre» pour le Service d’accès aux soins (SAS), susceptible d’évoluer en fonction des besoins. Le dispositif est expérimenté dans 22 sites pilotes cet année, dans l’objectif d’une généralisation au 1er janvier prochain. Le médecin régulateur percevra 90 €/heure avec prise en charge des cotisations. La participation au SAS sera valorisée dans le cadre du forfait structure, à hauteur de 1 400 €. Pour les généralistes effecteurs, la rémunération s’appuiera sur une base forfaitaire à travers 5 paliers.
Les spécialités en tension sont revalorisées (pédiatrie, psychiatrie, endocrinologie, gynécologie médicale) de même pour l’avis ponctuel du consultant qui passe à 55 €.
Concernant la téléconsultation et la téléexpertise, l’avenant vise à «tirer les enseignements de la crise en accompagnant l’essor de la télémédecine, dans un cadre respectueux du parcours de soins et de la qualité des soins», souligne Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée à la gestion et à l’organisation des soins de la Cnam. Pour la téléconsultation, la règle d’une visite en présentiel dans les 12 mois précédents sera supprimée. Le recours à un praticien situé en dehors du territoire du patient sera possible dans les déserts médicaux. Le seuil annuel maximal d’activité en télémédecine est fixé à 20%. Afin de favoriser le développement de la téléexpertise, les critères sont assouplis et tous les professionnels de santé pourront la demander (dans une limite de 4 par an et par patient).
Sur le plan du numérique, l’avenant prévoit une incitation au remplissage initial du Volet médical de synthèse (VMS) par le médecin traitant pour ses patients en ALD à échéance mi-2023 (1500 € : 50% des VSM alimentés, 3000 € : 90% des VSM alimentés). Dans le cadre du forfait structure, les médecins sont encouragés à développer leurs «usages du numérique» à travers 2 nouveaux téléservices : déclaration de grossesse et prescription de transport ainsi que l’introduction de 4 indicateurs sur le Segur du numérique (alimentation du DMP, utilisation de la messagerie sécurisée avec les patients, utilisation de la e-prescription et de l’application carte Vitale).
Concernant le calendrier «la plupart des mesures entreront en vigueur à la fin du premier trimestre 2022», précise Thomas Fatôme. Elles porteront sur 2022 et 2023, avant qu’une prochaine convention prenne le relais.
Ce qu’en pensent les syndicats
Si l’avenant 9 a été largement ratifié, il est loin de faire l’unanimité chez les syndicats, qui apparaissent divisés.
«MG France travaille déjà en vue de la prochaine convention. Celle-ci devra être le starter d’un vrai renouveau pour la médecine libérale et tout particulièrement pour la médecine générale», indique un communiqué du représentant des généralistes, signataire de la convention. «L’augmentation du nombre de patients âgés dépendants nécessitait de donner aux médecins traitants, sans attendre, les moyens de les prendre en charge à domicile. De même les médecins engagés dans les 22 expérimentations territoriales du SAS avaient besoin d’un cadre leur donnant des moyens», poursuit-il.
La CMSF «a noté des avancées tarifaires pour médecins généralistes et des autres spécialités mais déplore des revalorisations ciblées et la place croissante des forfaits au détriment de la valorisation de l’acte médical». Elle regrette en particulier les dispositions sur le SAS et le VMS. La confédération a toutefois validé le texte dans l’attente de la prochaine convention «qui doit permettre une véritable restructuration de la médecine de ville».
Du côté des non-signataires, le SML. «Avec l’avenant no 9, qui ne comporte aucune avancée sur la valeur de la consultation de base (C et CS) et bride la visite longue, le compte n’y est pas !», dénonce le syndicat. Même son de cloche pour l’UFML-S : «Moins de 800 Ms pour cet avenant alors que le Ségur hospitalier de la santé a dégagé 8 Mds en 2021 + 14,5 Mds € sur cinq ans, auxquels s’ajoute la récupération par l’état de 10 Mds de dettes des hôpitaux publics (32 Mds). De qui se moque-t-on ?»