Le cru 2023 du rapport Charges et Produits présenté le 7 juillet dernier au conseil de la CNAM est particulièrement dense et ambitieux.
L’Assurance Maladie entend désormais inscrire son action dans un cadre pluriannuel via notamment, le suivi de plusieurs «fils rouges»: construire une approche par pathologie ; une approche par population ; l’organisation territoriale des soins ; et enfin, une politique d’efficience autour de la gestion du risque. Pour chacun de ces thèmes, le régime général avance plusieurs propositions qui pourraient trouver leur place dans le prochain PLFSS ou dans de futures négociations conventionnelles.
À l’instar du rapport 2022, l’Assurance Maladie continue de structurer son action autour d’une approche par pathologie. Pour le «cru» 2023, un focus spécifique est réalisé autour du diabète et de l’insuffisance cardiaque. Sur ces deux pathologies, priorité est donnée à la prévention et au renforcement des parcours de soins. Ainsi sur le diabète, la CNAM entend s’appuyer sur les potentialités des dernières innovations numériques (ex.: diversification de l’offre numérique de SOPHIA). Concernant l’insuffisance cardiaque, elle avance plusieurs propositions : le lancement prochain d’une campagne de communication destinée au grand public et pour les PS, le projet de lancement de Prado Insuffisance Cardiaque pour mieux assurer la coordination du suivi en ville des patients, la création d’équipes de soins spécialisées en cardiologie pour couvrir l’ensemble du territoire national et le développement de la télésurveillance pour les cas d’insuffisance sévère, notamment via la mise à disposition de balances connectées.
En ce qui concerne l’axe «approche populationnelle», l’Assurance Maladie entend optimiser les actions de prévention qu’elle porte en travaillant en amont sur les facteurs de risque. Ainsi sur le champ de la maternité, une attention particulière est accordée à la consommation du tabac au moment de la grossesse (qui concerne 16,3% des femmes en France, record d’Europe !) et sur les troubles psychiques peu ou mal détectés. Pour améliorer la situation la CNAM préconise notamment d’introduire un entretien postnatal avec une sage-femme et d’élargir le dispositif Mon Psy à ces dernières pour améliorer la détection de dépression post-partum. La piste visant à encourager les femmes enceintes à choisir une sage-femme référente est également avancée.
Sur le suivi des enfants, les récentes études Epi-Phare démontrent une surconsommation médicamenteuse chez les moins de 6 ans (86% font chaque année font l’objet d’une prescription médicamenteuse). Autre constat, la qualité de suivi de ces populations se révèle insuffisante (25% des enfants ont moins de 8 consultations la première année alors que 11 examens sont recommandés). Propositions avancées par la CNAM : renforcer les dépistages des troubles visuels et du langage en milieu scolaire, faire de Mon Espace Santé un carnet de santé numérique et renforcer le «aller-vers».
Sur l’accès financier aux soins, si l’Assurance Maladie se félicite de la montée en charge du dispositif du 100% Santé, elle ambitionne d’en étendre son champ. Cela concernerait l’orthodontie, les prothèses capillaires et les semelles orthopédiques, et cela en lien avec la promesse faite par Emmanuel Macron lors de la dernière campagne présidente. En parallèle, la CNAM préconise également d’élargir le champ de couverture de la CSS aux enfants de moins de 25 ans des bénéficiaires du RSA.
Sur le chapitre dédié au renforcement de l’accès aux soins dans les territoires, l’objectif est clair : lutter contre les déserts médicaux et faciliter l’accès à un médecin traitant pour les 11% de Français qui en sont dépourvus. Pour y remédier, la CNAM entend mener déployer plusieurs actions :
- Instauration d’«une boîte à outils» pour les professionnels de santé (miser sur les assistants médicaux pour libérer du temps médical, revaloriser le modèle économique des IPA, trouver de nouveaux modèles de coopération médecin/infirmier, moins de charge administrative et déploiement de protocoles de coopération pour faciliter le partage de tâches entre professionnels au niveau local).
- Organisation d’une présence accrue de médecins spécialistes dans les zones sous-dotées via des consultations avancées.
- Finalisation d’un cadre structurel amélioré autour de la téléconsultation.
- Amélioration l’accès aux soins non programmés en journée via la généralisation du SAS
Enfin sur le chapitre «Efficience et pertinence des soins», c’est un plan d’économies s’élevant à 1,213 Md € qui est prévu pour 2023, soit une «légère» hausse de 200 Ms par rapport à ce qui est prévu pour 2022. On notera que l’effort demandé sur le contrôle et la lutte contre la fraude portera sur près de 300 Ms €. En ce sens, l’Assurance Maladie ambitionne de davantage sécuriser la facturation des professionnels de santé. Concernant les prescriptions, on retiendra qu’un nouveau plan d’action devrait être défini sur la pertinence des arrêts de travail. Il en ira de même concernant la pertinence en matière d’imagerie médicale et de prescription de produits de santé.
Au final, ce ne sont pas moins de 30 propositions d’amélioration du système de santé qui sont formulées pour 2023 par l’Assurance Maladie.
Pour plus de détails sur le contenu du rapport, nous vous invitons à consulter le dossier qui y est consacré dans le numéro 1219 d’Espace Social Européen du 12 juillet.