A propos de la disparition de Jacques Chirac, notre hommage sera concret. Il nous écrivit ainsi une belle lettre en 2002, lors du 2ème tour de l’élection présidentielle pour un appel à défendre la République sociale qu’est la France, encore et toujours.
Un moment privilégié pour nous.
Car l’ancien secrétaire d’Etat du général de Gaulle en 1968 avec les accords de Grenelle, ministre ensuite, puis premier ministre et chef d’Etat, fut soit à l’origine, soit en adoubement politique assumé, l’auteur d’importantes réformes sociales et de santé. Quant bien même ses deux mandats ne furent pas une réussite économique.
Le plan Juppé par exemple qu’il a porté. Lequel fut poursuivi et amplifié par ses détracteurs de l’époque. Comme d’habitude…Un souvenir.
Octobre 1995, nous étions à la Sorbonne pour écouter le président de la République pour le 50ème anniversaires des ordonnances créatrices de la sécurité sociale française. Cet après-midi là, Jacques Chirac annonçait, revendiquait même la plus mutation de la sécurité sociale de l’après-guerre. « Beveridge supplante Bismarck désormais » écrivions nous à ce moment là.
24 ans après, cette mutation est là, pour toujours semble t-il. Il aura permis aussi la réforme des retraites de 2003, pilotée par François Fillon. Une réforme qui comme toutes les autres, bien que combattue par la gauche, n’a jamais été remise en question…
Nous connûmes aussi Jacques Chirac qui, à la différence du locataire actuel de l’Elysée, venait avec plaisir aux congrès de la Mutualité française pour parler de cette France des terroirs et des nécessités de réformes. Il comprenait les partenaires sociaux, les corps intermédiaires, car il savait que ces derniers portaient une part de la France.
Il a également été promoteur de deux grandes lois sur le handicap en 1975 et 2005 et du premier plan national Cancer en 2003. A sa façon, il cultivait un sens hors du commun dans le contact humain, surtout avec « les gens d’en bas ».
En outre, la Mutualité Agricole eut en Jacques Chirac un soutien fort. Le corps médical libéral et hospitalier n’eut guère à se plaindre de son parcours.
Sur le plan social, sa plus grande erreur électorale fut cette période de 1986-1988 avec le plan Seguin et une forme de libéralisme économique un peu échevelé. Une période qu’il regretta amèrement.
Jacques Chirac était à sa façon une tendance politique « rad-soc », un gaullisme social new look comme on dit. On a pu, ici et là, rejeter certains choix mais la vie politique française est ingrate et par trop binaire pour respecter la substance des hommes et la complexité de l’histoire.
On a qualifié à tort, nous semble-t-il, ces deux mandats présidentiels comme inutiles et sans relief. Ce qui est inexact. Aujourd’hui, il est de bon ton d’attribuer toutes les réformes, les petites et les grandes, au mérite du seul chef de l’Etat.
Un autre temps s’éteint pour toujours. Où, par delà les divergences politiques et humaines, on se parlait encore.
Hommage donc à un grand Français.
Photo: Conférence de Jacques Chirac sur le Plan Cancer du 27 avril 2006 à L’Elysée. Philippe Chagnon / Cocktail Santé