Plus de cinq années ont passé depuis sa disparition et Patrick Eyrignac, gendre de René Teulade, s’est décidé à écrire la vie de son beau-père.

Cet ouvrage est le sien. Fruit d’un long travail de recherches. Ce document restitue bien le parcours incroyable de René, notre ami, et fait œuvre quelque part de thérapie d’une disparition dont on ne se remet jamais vraiment. Et c’est la moindre des choses qu’ESE édite ce document. Lui qui permit l’aventure d’Espace social européen, qui fête cette année ses 30 ans d’existence. « Sans lui, nous ne serions pas là », avons-nous coutume de dire.

René Teulade était un homme vrai. Un authentique, comme rarement l’on en croise dans sa vie. Il respirait la France dans sa diversité, sa complétude, ses complexités. Il était aussi à l’aise dans les salons de la République que dans les champs de son pays natal. Il nous a appris ce morceau de la France, trop négligée aujourd’hui. Il connaissait tout le monde, c’en était même impressionnant, et même les animaux des fermiers et paysans du coin. Il fallait voir Teulade en campagne électorale, un sacré moment de vie ! Il nous disait souvent qu’existe aussi une France qui « marchait au pas des vaches  » surtout au ministère de la Santé et des Affaires sociales face aux « technocrates » parisiens. Je me rappelle ses premiers pas au ministère en 1992. Mes compagnons du moment, tous hauts fonctionnaires, m’interrogeant sur le mode : « Mais Pascal, qui est ce bonhomme ? » Même Bernard Kouchner me sollicitait, lui qui brassait si bien les réseaux de communication d’alors.

Depuis, frottés au réel de la vie, ils ont tous conservé un souvenir ému de ce temps, forcément trop court, où notre ministre voulait tant réformer la santé, la protection sociale et asseoir plus fortement la solidarité nationale. Même sa relation avec François Mitterrand était particulière. Parfois ce dernier l’appelait à l’Elysée pour évoquer la terre, les racines, les choses de la vie, voyant en René le représentant d’une France dans laquelle il se retrouvait. Il n’aimait pas les jeux vains de la politique parisienne et vécut mal la défaite électorale de 1993, voyant se déchirer son camp. Il n’aurait pas supporté ce qui se passe depuis deux ans…

Avec le recul, les souvenirs reviennent sur tant d’années passées ensemble. L’on pressent bien que pour notre pays en crise ce sont aussi des Teulade dont nous aurions besoin pour faire sens.

Editer cet ouvrage est aussi une façon de repasser le fil de sa propre vie. Militante, professionnelle, humaine, avec ses innombrables rencontres. Merci, René, pour nous avoir tant donné et appris.

 Pascal Beau
Directeur d’Espace Social Européen