La Cour des comptes a publié le 28 juillet dernier, un rapport établi à la demande de la commission des Affaires sociales du Sénat sur la mise en œuvre du 100% santé.
Ce «premier bilan a été complexe à dresser», soulignent les sages de la rue Cambon, rappelant le contexte largement perturbé par la crise sanitaire. Ils constatent «que la réforme, qui portait une forte ambition d’amélioration de l’accès financier aux soins, semble avoir trouvé au moins en partie son public, mais que son coût est difficile à maîtriser». Ces travaux confirment le constat de «résultats inégaux selon les secteurs» avec un taux de recours aux paniers sans reste à charge de 55% en dentaire, 40% en audiologie (avec une forte hausse du nombre de patients : 0,7 million fin 2021 contre 0,45 million en 2020), et seulement 17% en optique (soit les verres soit la monture) «avant tout du fait du recours des bénéficiaires de la CSS à ces équipements». Pour ce poste, une hausse du RAC est également observée de 29 % sur le panier libre, «soit un taux de 27 % sur l’ensemble des dépenses».
Pour améliorer la mise en œuvre de la réforme, la juridiction financière recommande d’améliorer la communication, mais aussi d’être plus vigilant sur les pratiques. Les vérifications de la DGCCRF auprès d’enseignes optiques et d’audioprothèses ont conduit à repérer des non-conformités dans 72% des cas, dont 40% en lien avec le 100% santé. La Cour recommande également d’évaluer la qualité des équipements, le questionnaire prévu n’ayant toujours pas vu le jour. Enfin, la mise en œuvre du tiers payant intégral est jugée insuffisante.
Concernant le coût de la réforme, une analyse plus poussée devra être conduite, compte tenu de «l’absence de réel partage des informations disponibles». Les projections des pouvoirs publics pour l’optique sont jugées trop optimistes, interrogeant sur l’équilibre général. Pour l’heure, les premières tendances indiquent «des dépenses supérieures aux prévisions pour l’AMO, mais inférieures pour l’AMC», a souligné François de la Guéronnière, président de section, lors de la présentation du rapport devant les sénateurs de la commission des Affaires sociales. Les charges ont ainsi augmenté de 127 Ms € pour le RO (contre 150 Ms escomptés). En revanche, un surcoût «potentiellement conséquent» est évoqué pour les complémentaires avec 265 Ms € de moindres économies (en s’appuyant sur les données de la FNMF), en lien avec les hypothèses sur l’optique.
Les magistrats appellent à un partage de données entre AMO et AMC, «en veillant à la mise à disposition de données de remboursement par ces dernières, et assurer, sur cette base, un suivi identifiant les dépenses exposées au titre de la réforme» . Autre recommandation, les prix limites de vente des audioprothèses du panier 100 % santé devraient être révisés à la baisse. Enfin, ils préconisent d’introduire une clause dans la convention nationale avec les chirurgiens-dentistes permettant d’agir en cas de dérapage des dépenses et de renforcer les contrôles de la mise en œuvre de la réforme par ces professionnels.